Dangers de la dépendance numérique
David Monniaux, directeur de recherche au CNRS : « Que se passerait-il si Trump ordonnait aux Gafam de cesser leurs services cloud à l’égard de nos gouvernements ? »
Dans une tribune au « Monde », le chercheur souligne les dangers de la dépendance numérique européenne à l’égard des géants du Web, soumis à la législation américaine.
Durant l’été 2025, la société Microsoft a confirmé qu’elle remettrait les données de ses utilisateurs aux autorités états-uniennes si celles-ci les réclamaient, quand bien même elles seraient stockées en France. Cette révélation n’avait rien de bien surprenant : il s’agit de l’application d’une loi américaine de 2018, le Cloud Act. Certes, cela contreviendrait aux lois européennes… mais une entreprise obéit en premier lieu aux lois de son pays.. […] Donald Trump […] ordonne des mesures de rétorsion à l’égard du procureur de la Cour pénale internationale, Karim Khan. Microsoft, qui gère des services informatiques externalisés pour cette cour, a coupé le courrier électronique de ce magistrat. On peut très bien imaginer le président américain ayant un accès d’humeur à l’égard de la France, par exemple au motif qu’elle gênerait son « plan de paix » en Ukraine. Dans cette optique de « géopolitique fiction », que se passerait-il s’il ordonnait aux Gafam [Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft] de cesser leurs services cloud à l’égard de notre gouvernement, de nos services publics, de nos armées ? […]
La critique de la dépendance française à Microsoft est ancienne. En 1998, Roberto Di Cosmo publiait, avec Dominique Nora, Le Hold-Up planétaire * […] (Le Monde, 23/10/25)
* Ce livre est disponible gratuitement en téléchargement depuis 2006 (sous licence Creative Commons BY-NC-ND).
